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LE CADAVRE ENCOMBRANT

 

 

Une femme exigeante n’est pas toujours facile à vivre. Même en Afrique.

Un chasseur avait ainsi une femme qui ne le laissait jamais en repos. Exigeante pour la maison ? L’homme s’arme de courage et construit une belle maison. Exigeante pour la nourriture ? L’homme rassemble toute son adresse et rapporte le meilleur gibier. Exigeante en amour ? Pas toujours facile à l’homme d’être à la hauteur, surtout quand la maison et la chasse l’ont vidé de ses forces...

Un jour, l’homme est allé trouver le sorcier, un coq et une bouteille de vin de palme dans les mains. Le sorcier a confectionné une mixture qui donnait aux attributs de sa masculinité la plus belle taille qu’une femme puisse désirer.

 

Mais depuis quelques jours, l’homme a remarqué que, quand il revient des champs le soir, des objets ont été déplacés dans la case. De même, plus bizarre, il lui semble bien que le niveau de son aphrodisiaque baisse dans la bouteille.

Un jour, il rentre plus tôt, se cache derrière la case et entend sa femme occupée avec un autre homme, occupée à une besogne qui lui est normalement réservée à lui. Alors il retourne chez le sorcier.

- Confectionne-moi un bon poison, je dois me débarrasser d’une panthère.

Le lendemain, il remplace son élixir d’amour par le poison du sorcier.

Le soir, quand il revient, sa femme pleure dans la case. Il entre. Un homme est étendu à terre à côté d’elle. C’est le fils du chef. Elle avoue tout à son mari. Mais lui, au lieu de la frapper comme il devrait, il est bien embêté.

- Le fils du chef ? Je risque gros si le chef apprend que son fils a été tué dans ma case !

Mais dans les situations périlleuses, le cerveau a de ces ressources insoupçonnées.

 

Le mari a une idée. Son voisin a une ruche et il n’a jamais voulu donner de miel à quiconque. Or c’est l’époque de la récolte. L’homme s’approche de la case de son voisin avec le cadavre sur les bras. Il imite la voix du fils du chef et il crie :

- Donne-moi du miel !

L’apiculteur répond :

- Pas question !

Il répète :

- Donne-moi du miel ou je vais mourir !

Le voisin répond :

- Va t’amuser ailleurs !

Le mari trompé dépose le corps par terre et va se cacher dans un anacardier. L’apiculteur arrive et voit le corps  du fils du chef.

- Zut alors ! C’était donc vrai ! Les foudres du chef vont me tomber dessus ! Que faire ?

Il ramène le corps chez lui pour le cacher. Il ne sait vraiment pas quoi faire.

Mais dans les situations périlleuses, le cerveau a de ces ressources insoupçonnées.

 

Tout d’un coup, il se met à rire :

- Chaque soir, le voleur du village, le contrebandier, ramène par derrière chez lui des sacs en appelant sa femme.

A la nuit tombée, il va près de la case du contrebandier. Il susurre :

- Eh ! Oh ! Voilà un paquet !

Et il passe à la femme un sac contenant le corps du fils du chef. Un peu plus tard, le contrebandier arrive :

- Eh ! Oh ! Voilà un paquet !

La femme dit :

- Tu as été bien vite ! Tu viens de m’en rapporter un !

- Comment ?

Le voleur rentre chez lui. Il regarde dans le sac et que voit-il ? Le fils du chef !

- Cette fois, je suis perdu ! Comment m’en débarrasser ?

Il ne sait vraiment pas quoi faire.

Mais dans les situations périlleuses, le cerveau a de ces ressources insoupçonnées.

 

Le contrebandier prend un arc et une flèche. Il traîne le corps à côté de la case du chef en pleine nuit. Il cale le corps debout contre un grenier à mil. Il met l’arc dans la main et il installe la flèche comme si le fils du chef allait tirer. Un peu plus tard, le chef sort de sa case pour aller pisser. Il voit une ombre qui le menace avec un arc. Le chef n’est pas chef pour rien ! Il referme vite sa porte, prend sa lance. Puis il rouvre tout doucement sa porte et envoie sa lance d’un coup sec dans le corps qui s’écroule. Et le chef va se recoucher.

Le lendemain, les femmes trouvent le cadavre, elles  se mettent à pleurer et à pousser des cris stridents qui réveillent le chef en sursaut. Il sort de sa case et voit son fils avec sa propre lance plantée dans la poitrine.

 

Les funérailles ont duré plusieurs semaines. Les femmes ont beaucoup pleuré, la femme du contrebandier a pleuré d’émotion, la femme de l’apiculteur a pleuré de soulagement, la femme du chasseur a pleuré de chagrin. Et les hommes n’ont pas pleuré parce que ce n’est pas digne.

Le chasseur en a été quitte pour retourner voir le sorcier pour obtenir une nouvelle fiole de liquide magique parce que sa femme était toujours aussi exigeante. Mais les prix avaient monté : il a fallu un beau coq et deux bouteilles de vin de palme.

Et ainsi la vie tranquille a repris dans le village.

 

Alors du paysan, de l’apiculteur ou du contrebandier, lequel a été le plus malin ?

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Face à une situation difficile, on trouve toujours une solution.

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Mon conte monte tout droit, palmiers et cocotiers.

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